Mat À L'étouffé
Roberto Alajmo

« Mieux vaut avoir des remords que des regrets. » Grand roublard devant l’Éternel, Giovanni Alagna n’a vécu que d’après ce seul principe. Arrivé à bout de course, enfermé dans sa voiture, encerclé par la foule, il revient sans complaisance sur une vie entièrement construite sur le mensonge, l’arnaque et la fuite, et sur la succession de coups qui lui ont fait perdre la partie.Directeur de théâtre sans talent artistique mais opportuniste à souhait, il a longtemps avancé sur l’échiquier de sa vie avec une aisance insolente. Vivant bien au-dessus de ses moyens, accumulant voitures et maîtresses, il ne payait ni ses dettes ni ses impôts et passait à travers les mailles du filet en changeant sans cesse d’adresse et de numéro de téléphone.Mais à force de tricher, mentir et tromper, son univers s’est effondré. Sa femme l’a quitté, ses amis l’ont abandonné, ses filles l’ignorent, ses créanciers le pressent. La chance a tourné, le roi agonise. Expulsé de sa maison et de son théâtre, démuni et paumé, il en est réduit à enlever ses filles et à errer en voiture jusqu’à se retrouver ce jour-là, cerné par tous ceux qu’il a arnaqués. Fait échec et mat par ses propres pions, il décide finalement de signer sa défaite dans une dernière scène dont il rate même le côté spectaculaire.Avec cette peinture au vitriol de la chute d’un homme sans scrupules, Roberto Alajmo clôt le triptyque acide de sa Comédie humaine, entamée avec Un cœur de mère et Fils de personne, qui parait simultanément en collection Rivages/Poche, et signe un roman audacieux, dont l’originalité tient à une narration à la deuxième personne du singulier et à une structure calquée sur une partie d’échecs qui se dirige, inéluctablement, vers le « mat à l’étouffée ».